Le soleil n'étant pas encore levé alors que nous sommes déjà sur pied, nous fuyons vers un endroit ensoleillé pour petit-déjeuner. Nous découvrons un super bivouac possible, en bord de rivière Tungnaá, sur une petite bifurcation de la F26, peu après la monstrueuse centrale hydroélectrique en construction sur le lac Thórisvatn. Si nous avions continué à rouler un quart d'heure hier soir... Quelques moutons nonchalants nous tiennent compagnie pendant le déjeuner. Et de nouveau nous avalons de la piste, jusqu'au Landmannalaugar. Le site vaut le détour : ici le noir du basalte cède la place aux rouge, orangé, vert des rhyolites, vert fluo des mousses aussi, et noir brillant des obsidiennes.
Nous garons le Land au départ d'un sentier, et randonnons dans la coulée de lave andésitique de Námshraun, puis redescendons vers le lac Frostastadhavatn, dont les eaux turquoise contrastent avec le paysage. Nous escaladons rapidement le cône parfait de Stútur, édifice de scories instables très raviné par le passage des randonneurs, à la forme de volcan typique comme on en trouve dans les livres pour enfants. Comme d'habitude, Christophe mitraille avec l'appareil numérique pour réaliser d'improbables panoramas à 360°. Nous rentrons à la voiture totalement émerveillés. Frédérique fouille les remblais en bord de piste pour dénicher le plus gros fragment d'obsidienne à ramener à la maison. Elle s'acharne à coups de pierres sur une boule d'obsidienne pour en détacher un fragment à la cassure brillante, mais le maudit caillou tient bon. Heureusement Christophe vient à son secours avec le marteau destiné à planter les sardines de l'auvent, et il règle le problème en un coup bien placé (sur l'obsidienne, pas sur Frédérique). Nous aurons un bel échantillon d'obsidienne, à la fracture conchoïdale typique, pour notre collection.
A cinq minutes de voiture, le camping du Landmannalaugar témoigne de l'affluence des touristes dans la région : grands bâtiments en bois sur pilotis abritant la douche et les WC, accueil-point d'information, buvette, centre équestre... Mais le camping ne nous attire pas vraiment : venté, rocailleux, au milieu d'un va-et-vient continu de touristes : nous allons chercher un autre camping plus tranquille pour nous loger. D'ailleurs la carte en indique un à Hólaskjól, non loin après avoir traversé le Landmannalaugar par la piste F208.
Cette traversée est un pur enchantement, l'Islande typique des magazines : des torrents qui paressent entre les mousses vert fluo, une piste de terre en montagnes russes aux pentes impressionnantes, des montagnes lumineuses et colorées, et de nombreux gués larges mais peu profonds où coule une eau limpide et froide. Les pauvres cyclistes nous font pitié, obligés de se déchausser à chaque traversée pour se rechausser ensuite et recommencer cinq minutes plus tard. Je conduis le Land cet après-midi, et je me fais franchement plaisir.
Pour finir, nous descendons dans une large gorge et trouvons le camping, grosse bâtisse rouge entourée de champs, apparemment déserte. Ce sont deux jeunes renards polaires, un miteux et un deuxième à la magnifique fourrure gris-blanc, qui nous accueillent. Ils ont leur gamelle au camping, et ne sont absolument pas farouches. A l'étage, qui sert d'accueil et de refuge, nous trouvons un jeune couple qui semble tenir l'établissement. Aucun problème pour camper, ni pour prendre la douche.
A peine installés, l'auvent monté et la tente relevée, un énorme car rempli d'étudiants débarque. Nous qui croyions être tranquilles ! Du coup nous accélérons la cadence pour réussir à prendre la douche avant que tout ce monde ne squatte l'unique salle de bains. Mais contrairement à nos craintes, la nuit est très calme, sans le moindre vent, et donc très reposante. Et le lendemain c'est un soleil radieux qui nous réveille.